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Rencontre avec :
Daredjan Pkhakadze

CAP cuisine obtenu En 2019 à Strasbourg

Son plat préféré :

La brioche qui sort du four

Poste actuel :

Cheffe de cuisine du restaurant Dostoïevski à Strasbourg

Si tu devais te présenter en quelques mots ?

J’ai 27 ans, j’ai 2 enfants de 8 et 4 ans. Je suis très motivée, toujours souriante, très ambitieuse et jamais fatiguée quand je travaille.

Daredjan, d’où viens-tu ?

Je suis arrivée de Géorgie en 2011 après avoir quitté mon pays pour des raisons politiques. Ma mère était juriste et mon mari était un militant, nous avons dû partir directement après mon baccalauréat. Pendant les trois premières années en France, je ne parlais pas un mot de français, je savais à peine dire « bonjour » et de toute façon je pensais que je rentrerais dans mon pays mais on n’a jamais pu y retourner depuis 10 ans. J’ai appris le français avec les gens, la télévision …

“Le coup de feu pour moi c’est un vrai plaisir… quand le premier client arrive, c’est une fête ! «

Où travailles-tu ?

Je suis cheffe de cuisine du restaurant Dostoïevski à Strasbourg depuis juillet 2020 où on sert toutes sortes de cuisine orthodoxe : grecque, moldave, géorgienne, russe … et nous sommes collés à l’église orthodoxe. Au début, on ne faisait que salon de thé les vendredis, samedis et dimanches car on n’avait pas la licence mais maintenant on fait aussi du salé à emporter, surtout depuis le confinement. Parfois le dimanche on allait jusqu’à 120 couverts !

D’où t’es venue cette passion pour la cuisine et comment s’est passé ton année de formation chez Des Étoiles et des Femmes?

La cuisine c’est ma vie ! Ma passion pour la cuisine vient de ma mère et de ma grand-mère qui cuisinent très bien. Ma grand-mère était professeure de mathématiques mais elle avait aussi une grande pâtisserie boulangerie et j’ai tout appris avec elle. Quand je suis arrivée en France, je me suis occupée de mes enfants pendant quelques années et je continuais de beaucoup cuisiner pour mon entourage. En 2017, le Refugee Food Festival m’a contacté pour savoir si je voulais participer à leur édition. J’ai bien sûr accepté et pendant 3 jours, j’ai proposé des plats géorgiens sur le marché de Noël de Strasbourg avec beaucoup d’autres réfugié·e·s qui venaient de partout. C’était magnifique ! Et c’est le festival qui m’a parlé « des étoiles et des femmes. » 

Je me disais « comment je vais pouvoir faire cette formation sans parler ni écrire français ? ça passe ou ça casse. Au début je ne comprenais pas du tout certains mots comme “ciseler”, “émincer”… c’était très difficile mais les professeurs du lycée Alexandre Dumas étaient incroyables, ils m’expliquaient tout et répétaient plusieurs fois sans hésiter. Travailler en cuisine c’est oublier en partie sa famille, ses enfants … pendant un temps; mon mari a très bien réagi… c’était une chance pour moi d’intégrer une cuisine avec un diplôme français, il m’a beaucoup aidé et ma mère habitait avec nous pour garder les enfants.

Je voulais faire mon stage dans un étoilé et je l’ai fait à l’hôtel 5 étoiles Régent Petite France au restaurant Le pont tournant, les plats devaient être parfaits. En arrivant je ne savais pas éplucher un légume comme on doit le faire au restaurant, j’ai commencé par ça puis petit à petit j’étais au chaud, à la pâtisserie … J’y ai passé l’année et ça a été une très belle expérience, c’était comme une famille. Tout ce que j’ai appris je l’utilise aujourd’hui : le travail d’équipe, l’hygiène, la vitesse et maintenant que je suis cheffe je comprends mieux pourquoi le chef criait parfois!

« Bien sur que je continue avec le Refugee Food Festival ! C’est là que tout a commencé pour moi et je ne veux pas l’oublier.»

Le coup de feu pour toi c’est …?

Un vrai plaisir et amusant ! J’attends juste le premier client qui arrive, c’est une fête et je suis très contente quand le plat revient vide !

Ta plus grande fierté ?

D’être la première cheffe de cuisine géorgienne à Strasbourg surtout qu’il y a peu de femmes en cuisine dans la ville !

Comment t’imagines-tu dans 5 ans ?

Dans 5 ans, j’aimerais ouvrir mon restaurant franco-géorgien pour mêler les deux traditions, ça donnerait quelque chose de magnifique, il me manque juste l’argent.

Interview par Kenza Berrada C